14 décembre 2005
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Difficile de parler des Maîtres du haîku classique sans commencer par Bashô. Bien sûr, les familiers de littérature japonaise n'apprendront rien ici, cette catégorie de billet s'adresse à ceux qui
découvrent le haïku. Que les experts me pardonnent ... ou rectifient les éventuelles erreurs.
Bashô, de son véritable nom Matsuo Munefusa, est né en 1644 près de Kyoto. Fils de samouraï, donc noble, il reçoit l'éducation en rapport avec sa condition, à la fois guerrière et raffinée. C'est au début de l'adolescence qu'il étudie avec un Maître la poésie à la cour de son Shôgun, en particulier les formes de poésie courtes telles que le tanka. Le jeune homme montre rapidement des dispositions littéraires remarquables et un sens aigu de l'observation. Il acquiert ainsi une certaine réputation à Edo (l'ancienne Tokyo). Il détache du tanka le premier tercet, le hokku, et lui donne son autonomie. Ce n'est que plus tard qu'on l'appellera haïku.
C'est clair: Matsuo Munefusa ne sera jamais samouraï. Il se voue exclusivement à la poésie, fondant même une école. Vers 1680, il renonce à la vie mondaine et se retire dans l'ermitage que lui ont construit ses élèves, prenant même l'habit de moine. Devant sa retraite, il plante un arbre offert par ses élèves: un bananier, Bashô en Japonais. C'est sous ce nom qu'il passera à la postérité.
Dès lors, sa vie sera tout entière vouée à la poésie, à son école, et aux voyages qu'il effectuera surtout dans les dix dernières années de sa vie. Il en résultera des récits de voyage, des haïbuns littéralement truffés de haïkus. Ses élèves écriront des récits où sa méthode de travail est abondamment dépeinte, alliant rigueur et bonhommie.
En 1694, il effectue un dernier voyage à Osaka mais, malade, il doit rebrousser chemin et rentre chez lui. On dit qu'il dicta là un dernier haïku à ses élèves puis, ayant cessé de s'alimenter, il brûla de l'encens et se libéra de ce monde le 28 novembre 1694.
Sur sa tombe, on planta un bananier.
La popularité de Bashô ne s'est jamais démentie. Encore aujourd'hui, il suffit de parler de lui à un Japonais pour voir ses yeux s'éclairer et l'entendre citer quelques haïkus du Maître. J'en ai encore fait l'expérience il y a quinze jours avec les deux traductrices japonaises du site web de ma société. Bashô est une gloire littéraire nationale.
Il a laissé de nombreuses notes sur son art et fait l'objet de nombreuses biographies et études faciles à trouver en librairie ou par une simple recherche sur le Net.
L'oeuvre de Bashô est immense, tant par sa quantité que sa qualité. Très proche de la nature, tout à la fois tendre, truculente, profondément humaine, la poésie de Bashô incarne pour certains à elle seule le haïku classique. Obsédé, surtout sur la fin de sa vie, par l'idée de karumi (légèreté), il est vrai que son oeuvre véhicule à merveille cette saveur si particulière du haïku. Si particulière et si difficile à reproduire!
Je n'en dirai pas plus, je vous laisse vous reporter à l'un des nombreux ouvrages consacrés au Maître, il y en a tant. Sachez que le respect et l'amour des amateurs de haïkus pour Bashô sont immenses et largement justifiés. J'ai essayé ci-après de donner quelques extraits de son oeuvre moins célèbres que ceux que l'on cite habituellement, dans la magnifique traduction de Joan Titus-Carmel (Cent onze haïkus, éd. Verdier). Je me sens tout petit devant eux, vraiment tout petit ...
et ce haïku de voyageur:
et sans doute l'un des derniers, peut-être celui qu'il dicta à ses élèves:
Bashô, de son véritable nom Matsuo Munefusa, est né en 1644 près de Kyoto. Fils de samouraï, donc noble, il reçoit l'éducation en rapport avec sa condition, à la fois guerrière et raffinée. C'est au début de l'adolescence qu'il étudie avec un Maître la poésie à la cour de son Shôgun, en particulier les formes de poésie courtes telles que le tanka. Le jeune homme montre rapidement des dispositions littéraires remarquables et un sens aigu de l'observation. Il acquiert ainsi une certaine réputation à Edo (l'ancienne Tokyo). Il détache du tanka le premier tercet, le hokku, et lui donne son autonomie. Ce n'est que plus tard qu'on l'appellera haïku.
C'est clair: Matsuo Munefusa ne sera jamais samouraï. Il se voue exclusivement à la poésie, fondant même une école. Vers 1680, il renonce à la vie mondaine et se retire dans l'ermitage que lui ont construit ses élèves, prenant même l'habit de moine. Devant sa retraite, il plante un arbre offert par ses élèves: un bananier, Bashô en Japonais. C'est sous ce nom qu'il passera à la postérité.
Dès lors, sa vie sera tout entière vouée à la poésie, à son école, et aux voyages qu'il effectuera surtout dans les dix dernières années de sa vie. Il en résultera des récits de voyage, des haïbuns littéralement truffés de haïkus. Ses élèves écriront des récits où sa méthode de travail est abondamment dépeinte, alliant rigueur et bonhommie.
En 1694, il effectue un dernier voyage à Osaka mais, malade, il doit rebrousser chemin et rentre chez lui. On dit qu'il dicta là un dernier haïku à ses élèves puis, ayant cessé de s'alimenter, il brûla de l'encens et se libéra de ce monde le 28 novembre 1694.
Sur sa tombe, on planta un bananier.
La popularité de Bashô ne s'est jamais démentie. Encore aujourd'hui, il suffit de parler de lui à un Japonais pour voir ses yeux s'éclairer et l'entendre citer quelques haïkus du Maître. J'en ai encore fait l'expérience il y a quinze jours avec les deux traductrices japonaises du site web de ma société. Bashô est une gloire littéraire nationale.
Il a laissé de nombreuses notes sur son art et fait l'objet de nombreuses biographies et études faciles à trouver en librairie ou par une simple recherche sur le Net.
L'oeuvre de Bashô est immense, tant par sa quantité que sa qualité. Très proche de la nature, tout à la fois tendre, truculente, profondément humaine, la poésie de Bashô incarne pour certains à elle seule le haïku classique. Obsédé, surtout sur la fin de sa vie, par l'idée de karumi (légèreté), il est vrai que son oeuvre véhicule à merveille cette saveur si particulière du haïku. Si particulière et si difficile à reproduire!
Je n'en dirai pas plus, je vous laisse vous reporter à l'un des nombreux ouvrages consacrés au Maître, il y en a tant. Sachez que le respect et l'amour des amateurs de haïkus pour Bashô sont immenses et largement justifiés. J'ai essayé ci-après de donner quelques extraits de son oeuvre moins célèbres que ceux que l'on cite habituellement, dans la magnifique traduction de Joan Titus-Carmel (Cent onze haïkus, éd. Verdier). Je me sens tout petit devant eux, vraiment tout petit ...
au milieu du champ
et libre de toute chose
l'alouette chante
au parfum des pruniers
le soleil se lève -
sentier de montagne!
pétale après pétale
tombent les roses jaunes -
le bruit du torrent
la fraîcheur -
j'en fais ma demeure
et m'assoupis
ce chemin-ci
n'est emprunté par personne
ce soir d'automne
et libre de toute chose
l'alouette chante
au parfum des pruniers
le soleil se lève -
sentier de montagne!
pétale après pétale
tombent les roses jaunes -
le bruit du torrent
la fraîcheur -
j'en fais ma demeure
et m'assoupis
ce chemin-ci
n'est emprunté par personne
ce soir d'automne
la rosée blanche
sa saveur solitaire
ne l'oublie jamais!
sa saveur solitaire
ne l'oublie jamais!
malade en voyage
mes rêves parcourent seuls
les champs désolés
mes rêves parcourent seuls
les champs désolés