12 décembre 2005
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Voilà ce qu'on entend souvent. Pensez! Trois lignes, dix-sept syllabes, une vraie rigolade.
D'ailleurs, même les mômes y arrivent, c'est dire.
Mouais. Déjà, les enfants font sans sourciller des choses dont nous ne sommes plus capables. Essayez un peu d'arriver au dix-neuvième niveau de Yugi-Ho contre les Tortues Ninja émeraude of the death-qui-tue pour voir. Impossible, alors que votre petit neveu de huit ans fait ça en riant et en dégustant son Kinder Bueno (quatre ans? ah, pardon!)
Trêve de plaisanterie. Plus l'expression est concise, plus la réflexion préalable doit être poussée. Démonstration.
Une situation de départ très simple: le trottoir noir de monde. La foule des achats de Noël sous le ciel gris du décembre parisien. Une superbe chevelure rousse encadrant un beau visage apparaît soudain au détour d'une rue et disparaît rapidement comme elle est apparue.
Nous allons voir qu'il y a d'innombrables manières de rendre cette scène en dix-sept syllabes ou moins. Tout dépend de ce qu'on met en lumière. Allons-y:
Romantique, élégiaque, on sent le regret de ne pas avoir pu retenir plus longtemps ladite beauté. C'est ma tendance Ki no Tsurayuki tombant amoureux d'une femme entrevue parmi les fleurs de cerisiers.
Plus dramatique à présent:
Ici, je mets plutôt en valeur le côté soudain de l'apparition, et le contraste avec l'uniformité tristounette de la foule.
J'ai souvent le défaut d'en dire trop, imposant ma vision au lecteur. Essayons donc une approche plus minimaliste. Ce n'est pas chose facile, car en condensant à l'excès, on ne peut installer l'ambiance. Certains participants de la liste haïku-fr, qui m'ont modestement demandé de ne pas les nommer, y arrivent admirablement. J'essaye à mon tour:
A l'évidence, c'est plus ouvert, je ne parle même plus de la foule, seule la sensation, le choc émotionnel, demeurent. Cependant, je peux ajouter de la force en terminant sur ce choc:
Enfin, pourquoi particulariser cette beauté rousse? Je l'ai tout juste aperçue, elle en est presque désincarnée, indéterminée. Je pousse donc jusqu'au bout en écrivant:
Cependant, en bon occidental, une image flotte obstinément dans ma tête, une métaphore même, interdit suprême en haïku! En fait, même Bashô en a utilisé occasionnellement. Il s'agit simplement de ne pas perdre totalement le contact avec la réalité. Ici, cette foule grise et affairée évoque pour moi la mer en hiver, d'où émerge parfois ... quelque chose. J'écris donc:
Et si je préfère évoquer la flamboyante chevelure plutôt que la brièveté de l'apparition, j'écrirai:
Quelle est ma version préférée? Qu'ai-je voulu transmettre? Ben ... tout ça à la fois. Et c'est bien le problème, je n'ai pas encore trouvé la parfaite synthèse, si toutefois elle existe!
Alors, facile le haïku?
Et vous, quelle version préférez-vous?
D'ailleurs, même les mômes y arrivent, c'est dire.
Mouais. Déjà, les enfants font sans sourciller des choses dont nous ne sommes plus capables. Essayez un peu d'arriver au dix-neuvième niveau de Yugi-Ho contre les Tortues Ninja émeraude of the death-qui-tue pour voir. Impossible, alors que votre petit neveu de huit ans fait ça en riant et en dégustant son Kinder Bueno (quatre ans? ah, pardon!)
Trêve de plaisanterie. Plus l'expression est concise, plus la réflexion préalable doit être poussée. Démonstration.
Une situation de départ très simple: le trottoir noir de monde. La foule des achats de Noël sous le ciel gris du décembre parisien. Une superbe chevelure rousse encadrant un beau visage apparaît soudain au détour d'une rue et disparaît rapidement comme elle est apparue.
Nous allons voir qu'il y a d'innombrables manières de rendre cette scène en dix-sept syllabes ou moins. Tout dépend de ce qu'on met en lumière. Allons-y:
à peine entrevue
dans la foule grise, lueur
d'une beauté rousse
dans la foule grise, lueur
d'une beauté rousse
Romantique, élégiaque, on sent le regret de ne pas avoir pu retenir plus longtemps ladite beauté. C'est ma tendance Ki no Tsurayuki tombant amoureux d'une femme entrevue parmi les fleurs de cerisiers.
Plus dramatique à présent:
dans la foule grise
la fulgurance soudaine
d'une beauté rousse
la fulgurance soudaine
d'une beauté rousse
J'ai souvent le défaut d'en dire trop, imposant ma vision au lecteur. Essayons donc une approche plus minimaliste. Ce n'est pas chose facile, car en condensant à l'excès, on ne peut installer l'ambiance. Certains participants de la liste haïku-fr, qui m'ont modestement demandé de ne pas les nommer, y arrivent admirablement. J'essaye à mon tour:
fulgurance
dans la grisaille
d'une beauté rousse
dans la grisaille
d'une beauté rousse
une beauté rousse
dans la grisaille -
fulgurance
dans la grisaille -
fulgurance
beauté rousse
dans la grisaille -
fulgurance
dans la grisaille -
fulgurance
éclat bref du phare
sur la foule démontée -
une beauté rousse
sur la foule démontée -
une beauté rousse
éclat rouge du phare
sur la foule démontée -
une beauté rousse
sur la foule démontée -
une beauté rousse
Alors, facile le haïku?
Et vous, quelle version préférez-vous?