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Manteau d'étoiles, l'haïku-blog de Richard

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Ce blog est né d'un haïku. Le voici ...

couché sur l'herbe
dans mon manteau d'étoiles
j'ai dormi

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Manteau d'étoiles



Bienvenue sur le blog haïku de Richard (alias Yamasemi), principalement consacré au haïku et au senryû, un style de poème court venu du Japon.

Découvrez mon itinéraire dans l'écriture, une présentation des Maîtres du haïku et mes propres haïkus et senryûs au fil des jours. Vous trouverez plus d'informations sur ce blog dans la page d'aide.

Vous pouvez si vous le désirez réagir sur chaque article en utilisant le lien "Ajouter un commentaire" et, si vous avez apprécié votre visite, vous pouvez aussi recommander ce blog.
12 décembre 2005 1 12 /12 /décembre /2005 17:21
Voilà ce qu'on entend souvent. Pensez! Trois lignes, dix-sept syllabes, une vraie rigolade.
D'ailleurs, même les mômes y arrivent, c'est dire.

Mouais. Déjà, les enfants font sans sourciller des choses dont nous ne sommes plus capables. Essayez un peu d'arriver au dix-neuvième niveau de Yugi-Ho contre les Tortues Ninja émeraude of the death-qui-tue pour voir. Impossible, alors que votre petit neveu de huit ans fait ça en riant et en dégustant son Kinder Bueno (quatre ans? ah, pardon!)

Trêve de plaisanterie.  Plus l'expression est concise, plus la réflexion préalable doit être poussée. Démonstration.

Une situation de départ très simple: le trottoir noir de monde. La foule des achats de Noël sous le ciel gris du décembre parisien. Une superbe chevelure rousse encadrant un beau visage apparaît soudain au détour d'une rue et disparaît rapidement comme elle est apparue.

Nous allons voir qu'il y a d'innombrables manières de rendre cette scène en dix-sept syllabes ou moins. Tout dépend de ce qu'on met en lumière. Allons-y:

à peine entrevue
dans la foule grise, lueur
d'une beauté rousse

Romantique, élégiaque, on sent le regret de ne pas avoir pu retenir plus longtemps ladite beauté. C'est ma tendance Ki no Tsurayuki tombant amoureux d'une femme entrevue parmi les fleurs de cerisiers.

Plus dramatique à présent:

dans la foule grise
la fulgurance soudaine
d'une beauté rousse

Ici, je mets plutôt en valeur le côté soudain de l'apparition, et le contraste avec l'uniformité tristounette de la foule.

J'ai souvent le défaut d'en dire trop, imposant ma vision au lecteur. Essayons donc une approche plus minimaliste. Ce n'est pas chose facile, car en condensant à l'excès, on ne peut installer l'ambiance. Certains participants de la liste haïku-fr, qui m'ont modestement demandé de ne pas les nommer, y arrivent admirablement. J'essaye à mon tour:

fulgurance
dans la grisaille
d'une beauté rousse

A l'évidence, c'est plus ouvert, je ne parle même plus de la foule, seule la sensation, le choc émotionnel, demeurent. Cependant, je peux ajouter de la force en terminant sur ce choc:

une beauté rousse
dans la grisaille -
fulgurance

Enfin, pourquoi particulariser cette beauté rousse? Je l'ai tout juste aperçue, elle en est presque désincarnée, indéterminée. Je pousse donc jusqu'au bout en écrivant:

beauté rousse
dans la grisaille -
fulgurance

Cependant, en bon occidental, une image flotte obstinément dans ma tête, une métaphore même, interdit suprême en haïku! En fait, même Bashô en a utilisé occasionnellement. Il s'agit simplement de ne pas perdre totalement le contact avec la réalité. Ici, cette foule grise et affairée évoque pour moi la mer en hiver, d'où émerge parfois ... quelque chose. J'écris donc:

éclat bref du phare
sur la foule démontée -
une beauté rousse

Et si je préfère évoquer la flamboyante chevelure plutôt que la brièveté de l'apparition, j'écrirai:

éclat rouge du phare
sur la foule démontée -
une beauté rousse

Quelle est ma version préférée? Qu'ai-je voulu transmettre? Ben ... tout ça à la fois. Et c'est bien le problème, je n'ai pas encore trouvé la parfaite synthèse, si toutefois elle existe!

Alors, facile le haïku?

Et vous, quelle version préférez-vous?
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2 décembre 2005 5 02 /12 /décembre /2005 14:41
Mes premiers contacts avec la poésie japonaise datent de l'époque où j'étais en Math Sup'
A l'époque, j'ingurgitais 14h de cours de math par semaine, 10h de physique et 4 de chimie, plus le travail personnel. Voilà pourquoi on appelle familièrement les élèves Math Sup' et Math Spé' des "taupes".

J'ai toujours été le vilain petit canard chez les scientifiques, parce que j'aime aussi les lettres. La différence est pour moi très simple: les sciences, c'est mon boulot, les lettres, mes loisirs. C'est pourtant simple, mais je ne compte pas les occasions où j'ai dû le faire comprendre, non sans mal, à mes profs.

Anthologie de la poésie japonaise classique - G. Renondeau (Poésie/Gallimard)Or donc, entre deux espaces euclidiens et deux applications du premier principe de la thermodynamique, j'avais besoin de me changer les idées. Je pratiquais à l'époque le Karaté et le Taï Chi Chuan , j'avais bien besoin aussi d'une activité physique, et j'avais donc passablement la tête en Asie.  En allant chez Gibert acheter une enième compilation de problèmes et d'exercices de math, j'avais acquis au passage une Anthologie de la poésie japonaise classique réunie par G. Renondeau (éd. Poésie/Gallimard)
 
Partant des origines de la poésie japonaise, dès les premiers siècles de notre ère, cette anthologie se termine à l'ère Tokugawa par les grands Maîtres du haïku. Ce fut mon premier contact avec cette forme de poésie, et je dois dire que le déclic ne se fit pas immédiatement, tant il y avait déjà des merveilles dès la période dite "archaïque".

Les Japonais ont, semble-t-il, toujours aimé la poésie, et particulièrement les formes courtes. Les poèmes longs (chôka) semblent ainsi, dès la fin du VIIIè siècle, laisser place à des poèmes courts de 31 syllabes réparties en cing lignes de 5-7-5-7-7 syllabes, forme appelée tanka.

Bien plus tard, le tercet initial 5-7-5, le hokku, sera en quelque sorte extrait du tanka pour vivre une vie autonome: le haïku tel que nous le connaissons.

Il serait toutefois dommage, injuste et même sectaire d'ignorer les perles classiques antérieures au haïku telles que celle-ci:

  Fleurs de cerisier
Qui ne connaissez le printemps
  Que depuis cette année
Puissiez-vous ne jamais apprendre
Qu'un jour vous devrez tomber

ou encore:

   Faiblement
Parmi les nuages de fleurs
  Des cerisiers de montagne
Je l'ai entrevue
  Et je suis amoureux d'elle

deux poèmes de Ki no Tsurayuki (Xè siècles). Le second est à mon goût le plus beau poème d'amour que je connaisse avec le poème "A la Mystérieuse" de Rober Desnos.

Et que dire de ce paysage d'hiver peint par la princesse Shikishi, fille de l'empereur Go Shirakawa au XIIIè siècle:

   Je regarde
Et vois que l'hiver est là.
   Les canards sauvages
Sont sur la rive de la baie
Qui se prend d'une fine glace.

J'étais à l'époque plus sensible à ces tankas qu'aux haïkus qui terminaient l'ouvrage. J'étais très influencé par les poètes romantiques et symbolistes, dont ces tankas me paraissaient plus proche par la liberté de l'expression. Sur 31 syllabes, on a le temps d'évoquer des images et des sentiments. L'implacable fulgurance du haïku, qui peint un monde en 17 syllabes sans pour autant le figer, était encore trop forte pour moi.

Tanka, haïku, renga - le triangle magique, Maurice Coyaud (éd. Les Belles Lettres) Les poètes japonais écrivaient ensemble en ateliers, et il n'était pas rare qu'ils enchaînent les tankas et les hokkus en un long renga (poème lié), inventant ainsi ce que les surréalistes redécouvriront avec le cadavre exquis. L'extraction du tanka, puis du hokku, devenu haïku, va dans le sens d'une épuration de l'expression, d'une véritable distillation pour ne garder que l'essence de la poésie.
Ce mécanisme est très bien décrit par Maurice Coyaud dans son Tanka, haïku, renga - Le triangle magique (éd. Les Belles Lettres).

Aller droit au but, rechercher l'essentiel, épurer son expression. Regarder, juste regarder. Suggérer sans imposer. Tout ceci paraît si facile lorsqu'on lit les oeuvres des Maîtres, et pourtant ...

Ceci me rappelle une anecdote rapportée par Vasari. On raconte que le Pape Benoît IX demanda à Giotto de lui donner le plus pur signe de son talent. A main levée, Giotto traça un cercle parfait et l'envoya au souverain pontife. Peut-être est-ce une légende, mais si c'est vrai, le grand peintre aurait fait un fameux haïjin ...

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30 novembre 2005 3 30 /11 /novembre /2005 17:30
Vous l'aurez remarqué dans le billet précédent, mais les haïkus font souvent référence à une saison.
C'est le haïku classique, celui des Maîtres des 17è, 18è et 19è siècles tels que Bashô, Buson, Issa, Ryokân, Shiki ...

C'est le kigo, le "mot de saison", qui ancre le haïku dans la réalité et notamment dans le cycle naturel que nous oublions souvent, dans un monde où on trouve à peu près n'importe quel fruit ou légume n'importe quand par le jeu des importations du monde entier.

A l'époque du haïku classique, le cycle des saisons était beaucoup plus présent dans la vie de tous les jours, et le kigo renvoyait à ce cycle.

Comme toute règle établie depuis longtemps, celle-ci était faite pour être bousculée un jour, ce qui fit Hekigodo (1873-1937), élève de Shiki, pour lequel le kigo était "une chaîne rivée à un corps vivant" . Hekigodo (et ses élèves par la suite) explora les interdits du haïku, s'attirant les foudres de son ami d'enfance Kyoshi, également élève de Shiki et gardien scrupuleux de l'orthodoxie.

Personnellement, étant donné mon amour de la Nature, j'aime bien le kigo. Bien entendu, lorsqu'on débute on arrive un peu avec ses gros sabots: "promenade en automne", "orage d'été" etc. Ce n'est toutefois  pas un mal: pourquoi faire compliqué s'il suffit de faire simple?  Le kigo peut-être aussi plus subtil, ainsi évoquer le départ des hirondelles suffit à signifier la transition entre deux saisons:

Elles sont parties
les hirondelles, emportant
l'été sur leurs ailes


(Notez qu'ici, j'utilise une légère métaphore, ce qui pourrait me valoir les foudres des partisans de l'orthodoxie. Tant pis, c'est l'un des premiers haïkus que j'ai écrit, et il me plait comme cela. Non mais!)

De même, parler des bourgeons suffira à signifier le printemps tandis que les mandarines évoqueront immédiatement l'hiver.

L'usage du kigo dans le haïku classique était si répandu qu'on y a consacré des almanachs appelés saïjiki.  On pourrait dire que le saïjiki est un peu au haïku ce que le dictionnaire de rimes était à la poésie française, un outil important et fort utile pour les bons poètes ... une béquille (où une chaîne, effectivement) pour les autres!

Voici deux exemples des ces éphémérides poétiques en Français:
Cela vaut une visite, vous y découvrirez une finesse étonnante dans l'évocation des saisons.

Je pense aussi que vous comprenez maintenant pourquoi j'ai inscrit les quatre saisons dans les catégories de ce blog.
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25 novembre 2005 5 25 /11 /novembre /2005 16:35
Le Japon a toujours exercé une fascination qui frise en bien des occasions l'irrationnel.
Le corollaire de cette fascination est ce que j'appellerai "le complexe du gaïjïn" (gaïjïn : étranger)

La culture, l'art, la langue, la société japonaise sont il est vrai si particuliers qu'on admet généralement l'idée qu'il faut être japonais pour réellement les comprendre.

De là,  une idée insidieuse: pour pratiquer quelque chose venu du Japon, il faut être japonais, sinon ce ne sera qu'une pâle imitation.

Lorsque, enfant, j'ai démarré la pratique du judo, on pensait en effet que nous ne pourrions jamais maîtriser que la technique, soit l'aspect extérieur de l'Art souple. Il subsisterait toujours quelque chose de spirituel, de presque mystique et accessible uniquement aux Japonais, et qui expliquerait qu'ils soient toujours les meilleurs, en un mot, les vrais judokas.

Et puis, en une magistrale et dernière projection, Anton Geesink, premier judoka médaille d'or olympique non japonais, a fait mordre le tatami à cette idée romantique.

Nous avions il y a quelque jours une discussion similaire sur le haïku sur la liste de diffusion de l'AFH (Association Française de Haïku). Par respect, certains n'osaient appeler que tercets les haïkus non issus du Japon. S'ensuivit une discussion comme toujours riche et amicale sur ce thème.

Voici ce que j'ai posté sur la liste, et qui fut semble-t-il apprécié:

Je supervise la traduction du site web de mon entreprise dans de nombreuses langues, y compris le japonais. Je discutais de haïkus en déjeunant avec une responsable (japonaise) de notre agence de traduction. Elle ignorait qu'il y eut des haïkus en Français. Je l'ai redirigée sur les sites d'André Duhaime et de Serge Tomé. Ce qui l'étonnait était qu'on puisse faire du 5-7-5 (ce qui montre que c'était pour elle un aspect important) en Français.

Quelques jours plus tard, elle m'a envoyé un message, ravie d'avoir lu des haïkus du monde entier, auxquels elle ne contestait nullement cette appellation. Petite joie perso: elle a traduit l'un des miens en japonais pour l'envoyer à ses amis en précisant que c'était à l'origine un haïku français. Elle précise qu'elle n'a pas réussi cependant à faire un 5-7-5 en Japonais.

Ce que j'en déduis:

  • les non-Japonais ont parfois un complexe vis à vis d'une culture et même d'un "état" japonais très spécial et mystérieux, qui les empêcherait, quoi qu'ils fassent, d'aborder les arts japonais.
  • Inversement, les Japonais semblent s'en moquer éperdument. Du reste, s'ils avaient le même complexe vis-à-vis de l'Occident, il n'y aurait ni Canon, ni Nikon, ni Yamaha, ni dessins animés,  ni etc ....
  • Le 5-7-5 semble leur tenir à coeur (comme pour Philippe Costa dans son "Manuel pour écrire des Haïkus")
  • mais pas quand il s'agit d'un haïku traduit depuis une langue étrangère (et là, Maurice Coyaud les rejoint sur ce point dans la préface des "Fourmis ..." et nombre d'entre vous).

Bref, et à mon humble avis:

  • si c'est court (moins de 20 syllabes), si possible avec un rythme ternaire court/long/court (pas obligatoire)
  • s'il n'y a pas de métaphores "lourdes" ou de comparaisons directes
  • s'il y a une ouverture et/ou une certaine distance prise vis à vis de la chose vue et transmise
  • s'il y a de l'humour, de la dérision ou de l'autodérision
  • si à la lecture vous voyez la chose ou vivez la situation,

alors, c'est un haïku.

Je terminerai par cette pirouette: quand David Douillet marque un ipon, se demande-t-on s'il fait autre chose que du Judo parce qu'il n'est pas japonais?

Chaque peuple a son génie propre. Il rayonne et influence les autres peuples, qui s'emparent des éléments qui les intéressent et les réinterprètent avec leur propre génie.

Le haïku est une forme poétique qui s'est répandue dans le monde entier. Nous, francophones, avons su l'adapter à la langue française, il en est de même des anglophones, des russophones etc.

N'ayons donc pas de complexes, travaillons et progressons dans l'écriture de nos haïkus en Français.
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22 novembre 2005 2 22 /11 /novembre /2005 16:51
Il y a un débat récurrent parmi les amateurs et auteurs de haïkus: les liens supposés entre haïku et Zen. Ce débat agite en ce moment de manière un peu vive l'une des listes de diffusion que je fréquente.

Il est vrai qu'un poème de dix-sept syllabes sur trois lignes, c'est petit, c'est sobre, c'est léger. Cela correspond assez à l'idée que l'on se fait généralement du Zen, cette pratique du détachement, voire du dénuement, et du retour à l'essentiel.

Le Zen est à la mode. On en parle beaucoup, il fait vendre. Lorsque compréhension superficielle et intérêt commercial s'allient, il ne faut pas s'étonner alors de voir haïkus et Zen associés plus souvent qu'à leur tour.

Le livre du Zen, Manuela Dunn Maschetti (Philippe Picquier éd.)
Ainsi, on trouve facilement un petit coffret  "Le livre du Zen" par Manuela Dunn Mascetti (éditions  Philippe Picquier) composé de trois jolis petits livres: Paroles, Sagesse du Zen, Kôans, Leçons du Zen et Haïku, Poésie du Zen.



Petit manuel pour écrire des haïkus, Philippe Costa (Philippe Picquier éd.)
A l'opposé, certains s'opposent radicalement à tout lien entre Zen et haïku. Dans son "Petit manuel pour écrire des haïkus" (même éditeur), Philippe Costa tire à boulets rouges sur ce qu'il qualifie de "japoniaiseries".

Alors? Zen ou pas le haïku? Réponse de Normand: ça dépend ... Ca dépend des auteurs, des écoles, ça dépend des haïkus pour un même auteur. Bref, il y a autant de diversité que dans la vie.


Les plus beaux contes Zen, suivis de l'art des haïkus, Henri Brunel (Calmann-Lévy éd.)J'ai déjà dit que j'avais des "tendances Zen".  Attention, je ne suis ni un pratiquant, ni un expert du Zen. Cependant, ayant lu quelques ouvrages sur la question, je dirais qu'il me parle, qu'il correspond assez à ma sensibilité. Je suis sympathiZen en quelque sorte. Du reste, j'ai commencé à tenter d'écrire des haïkus après la lecture de "Les plus beaux contes Zen, suivi de l'art des haïkus" de Henri Brunel (éditions Calmann-Lévy), et je suis assez d'accord avec le position de l'auteur quant aux rapports entre haïkus et Zen. Rien de systématique, juste un petit arôme plus ou moins prononcé.



Incontestablement, certains haïkus de Ryôkan par exemple - moine Zen lui-même- ont-ils  une saveur Zen. Ainsi celui-ci:

Le voleur m'a tout pris
sauf la lune
à ma fenêtre


Quelle jolie résignation devant le cambriolage et l'envol de choses qui, après tout, n'étaient pas essentielles...
En revanche, difficile à mon sens de voir du Zen dans la joyeuse gauloiserie de celui-ci, du même auteur:

Réparant le toit
mes boules d'or rabougries
le vent froid d'automne


De même, j'étais sans doute dans une humeur Zen avec mes moutons fondus dans la brume et mon impression d'union du Ciel, de la Terre et de l'Homme. En revanche, je ne l'étais sans doute pas en notant:

Aux premiers frimas -
zut! toutes les dix minutes
envie de pisser


Je me méfie de toute attitude systématique. Chacun, en fonction de son vécu, de sa culture et de sa sensibilité du moment, pourra écrire des haïkus comportant ou non une saveur Zen plus ou moins prononcée. L'important est de fixer avec sincérité le moment, puis de le laisser s'envoler vers les lecteurs. S'il s'en trouve ne serait-ce qu'un seul qui trouve du plaisir à sa lecture, c'est gagné. Pour moi, c'est tout ce qui compte.
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21 novembre 2005 1 21 /11 /novembre /2005 22:55
Lorsque j'ai commencé à écrire des haïkus il y a cinq ans, je me suis inscrit à une liste de diffusion francophone. J'ai très vite été terrifié par la manière dont les membres de cette liste n'hésitaient pas à ré-écrire, parfois de fond en comble, les haïkus qui leur étaient proposés.

Cela me paraissait monstrueux, d'un irrespect révoltant. Comment oser toucher à la création d'autrui? La poésie me paraissait une expression si forte de la personnalité que j'assimilais ce procédé à un déni pur et simple de la personne. Et que dire des vers, cliniquement numérotés L1, L2 et L3 comme des vertèbres?

Bref, je n'ai plus rien écrit pendant cinq ans, découragé par les commentaires que je pouvais lire et par les transformations radicales que subissaient certains haïkus, pas les miens, car je n'osais pas en soumettre.

Je suis ainsi resté  spectateur muet, recevant les emails de la liste, mais ne participant pas. Et puis un jour quelqu'un a lancé un sujet sur un joyeux forum consacré au Palm. Et je m'y suis remis tout doucement.

Ce que je ne savais pas forcément, c'est que les anciens Maîtres ne procédaient pas autrement que les membres de la liste à laquelle je n'osais participer. Des témoignages d'élèves du grand Bashô le confirment: il n'y est question que de corrections, améliorations et révisions plus ou moins déchirantes.
 
Les membres de la liste ne faisaient qu'essayer de s'aider mutuellement à améliorer leur technique d'écriture. Mon seul problème, outre de ne pas être sûr de la valeur de ma création, était de trop m'y attacher, au point de m'y assimiler et de ne pas accepter qu'on y change quoi que ce soit, comme si on me changeait moi-même.

Ainsi du haïku d'hier. La version initiale soumise à la liste récemment était:

Fondus dans la brume
moutons et nuages bas
broutent l'herbe ensemble


Des voix se sont aussitôt élevées pour contester la présence cet "ensemble". Il était jugé redondant. On lui reprochait en outre de "fermer" le haïku en imposant ma vision, alors qu'il ne faut que transmettre en restant le plus possible détaché de l'événement pour mieux en rendre compte.

Je me suis évertué à défendre bec et ongles ce fameux "ensemble", d'abord en raison du rythme (le fameux 5-7-5, avec ce  dernier vers tronqué, j'avais l'impression d'une chute bien trop abrupte). Ensuite, j'ai fait valoir que "ensemble" laissait penser qu'il fallait aller au-delà du tableau champêtre pour comprendre qu'il y avait là une union du ciel, de la terre et de l'homme qui les contemple (j'ai des tendances marquées au Zen, on en reparlera...) Rien n'y faisait, j'étais seul contre tous, courtoisement, mais sûrement.

Quelques jours plus tard, je proposais ceci:

Vent d'octobre
les feuilles mortes se courent après
comme des chiens qui jouent


La réaction fut immédiate: "mortes" était redondant, car impliqué par "octobre". Quand au "comme", il allait à l'encontre d'une règle assez uniformément admise dans la communauté des haïjins (=auteurs de haïkus): pas de métaphores, encore moins de comparaisons directes. Le haïku retouché devenait:

Vent d'octobre
les feuilles se courent après -
des chiens qui jouent


Voilà qui est moins réthorique, moins scolaire, plus efficace, même si le tiret qui termine la seconde ligne et introduit un changement de perspective est tout de même un "comme" déguisé. Mais il est moins lourd, moins démonstratif. Il suggère, sans imposer.

Hier enfin, je tombais sur une traduction que je ne connaissais pas d'un haïku magnifique de mon auteur classique préféré, Issa. Ce dernier eut une vie difficile. Marié sur le tard avec une jeune fille beaucoup plus jeune que lui, il eut la douleur de la perdre ainsi que l'enfant qu'elle lui avait donné. Il écrivit alors:

Ce monde de rosée
n'est qu'un monde de rosée
mais


Et la seconde traduction donnait:

Rosée que ce monde-ci
rosée que ce monde... oui sans doute
et pourtant...


Plus explicite, plus réthorique, plus de pathos, mais beaucoup moins de force.

Il y a dans la première, et notament dans le simple "mais" final, tant de choses exprimées avec une pureté admirable: l'impermanence des choses, la fragilité et la brièveté de la vie humaine, le destin prématurément brisé d'êtres jeunes, comme ce dernier vers, ce "mais" qui dans son apparente vacuité contient tant de choses ...

Et, acceptant de me détacher de ce qui ne m'appartenait déjà plus,  j'acceptai du même coup d'oublier enfin mon "ensemble" ...
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