4 janvier 2006
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Le haïku est concis, la langue française ne l'est pas naturellement. Nous devons respecter une construction de phrase et une syntaxe bien précises que l'on ne peut bousculer trop sans verser dans l'obscurité ou le style télégraphique.
En principe, le haïku classique emploie des mots simples. Ce n'est pas une poésie flamboyante, encore moins hermétique. Toutefois, il n'est pas interdit, puisque c'est aussi une poésie de l'humour et de la légèreté (le karumi cher à Bashô) d'utiliser à bon escient un procédé amusant: le mot-valise.
C'est dans le livre Ralentir: mots-valises d'Alain Finkielkraut, ressorti depuis sous le titre Le petit fictionnaire illustré (éditions du Seuil) que j'ai pris contact avec cette cocasse manière de bricoler des mots avec d'autres mots, du lego lexical en somme. Ainsi du bahuri (un lycéen peu futé), du wagabon (un wagon qui se détache du train pour vivre sa vie tout seul) ou du truculent masturbin (point de vue ouvrier sur la masturbation).
Le procédé est maintenant passé dans le langage courant. Qui n'a pas entendu parler du publipostage, enfant monstrueux du postage et de la publicité qui encombre nos boîtes à lettres? Et je ne résiste pas au plaisir de citer le sketch de Jean-Marie Bigard à propos des inventions de langage des lendemains d'ivresse, avec les fameux bonjeoir (combinant boujour et bonsoir, pratique quand on ne sait même plus l'heure qu'il est), c'est clur (contraction de c'est clair et c'est sûr) et le monumental tu te laisses poustache (tu te laisses pousser la moustache).
Quel rapport avec le haïku? Voici: il y a quelque temps, j'avais écrit:
Je restais insatisfait de la première ligne. Elle ne rendait pas assez à mon goût le son très particulier des feuilles qui frottent le sol, à la fois léger et pourtant très net, agaçant l'oreille, ni leur frôlement, cette fuite rapide au ras du sol. Bruissement, frôlement, fuite ... j'ai longtemps cherché. Jusqu'à ce que j'écrive finalement:
qui ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais qui me satisfait aujourd'hui. Juste une lettre déplacée, un f pour un b. J'aime ces petits détails qui font basculer la perception.
Ce n'est toutefois pas un procédé (je n'aime pas trop le mot en matière de poésie) que j'emploierai souvent. A mon sens, la langue est assez riche pour ne pas avoir à trop user de ce genre de malice. Le débat est ouvert ... qu'en pensez-vous?
En principe, le haïku classique emploie des mots simples. Ce n'est pas une poésie flamboyante, encore moins hermétique. Toutefois, il n'est pas interdit, puisque c'est aussi une poésie de l'humour et de la légèreté (le karumi cher à Bashô) d'utiliser à bon escient un procédé amusant: le mot-valise.

Le procédé est maintenant passé dans le langage courant. Qui n'a pas entendu parler du publipostage, enfant monstrueux du postage et de la publicité qui encombre nos boîtes à lettres? Et je ne résiste pas au plaisir de citer le sketch de Jean-Marie Bigard à propos des inventions de langage des lendemains d'ivresse, avec les fameux bonjeoir (combinant boujour et bonsoir, pratique quand on ne sait même plus l'heure qu'il est), c'est clur (contraction de c'est clair et c'est sûr) et le monumental tu te laisses poustache (tu te laisses pousser la moustache).
Quel rapport avec le haïku? Voici: il y a quelque temps, j'avais écrit:
dans leur bruissement
on ne sait où elles se hâtent
les feuilles mortes
on ne sait où elles se hâtent
les feuilles mortes
Je restais insatisfait de la première ligne. Elle ne rendait pas assez à mon goût le son très particulier des feuilles qui frottent le sol, à la fois léger et pourtant très net, agaçant l'oreille, ni leur frôlement, cette fuite rapide au ras du sol. Bruissement, frôlement, fuite ... j'ai longtemps cherché. Jusqu'à ce que j'écrive finalement:
dans leur fruissement
on ne sait où elles se hâtent
les feuilles mortes
on ne sait où elles se hâtent
les feuilles mortes
qui ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais qui me satisfait aujourd'hui. Juste une lettre déplacée, un f pour un b. J'aime ces petits détails qui font basculer la perception.
Ce n'est toutefois pas un procédé (je n'aime pas trop le mot en matière de poésie) que j'emploierai souvent. A mon sens, la langue est assez riche pour ne pas avoir à trop user de ce genre de malice. Le débat est ouvert ... qu'en pensez-vous?