20 décembre 2005
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Il ne s'agit pas d'un tableau champêtre, mais de la traduction exacte des deux caractères composant le mot sen-ryû, qui vient tout simplement du surnom du
créateur de ce style.
Comme je le disais hier, le senryû se distingue du haïku par ses thèmes, son ton, et aussi sa forme. Tout comme on considère généralement Bashô comme le père du haïku, de même attribue-t-on à Karaï Masamichi Hachiemon (1718-1790) celle du senryû. Il faut croire que les surnoms du Japon féodal étaient assez bucoliques, puisque Bashô, surnom de Matsuo Munefusa, signifie bananier, tandis que Karaï se voyait surnommé Senryû, le saule de la rivière!
Senryû vécut donc moins de cent ans après Bashô. C'était un fonctionnaire et un maître de poésie à Edo. Son style était beaucoup plus familier et populaire que celui du créateur du haïku. Par ailleurs, le contexte politique n'était pas le même. L'administration des Tokugawa, dont Senryû faisait partie, était en pleine déliquescence. Corruption, incurie, affaiblissement du pouvoir et mécontentement généralisé, tout cela ne pouvait qu'inspirer un poète en verve et qui vivait les failles du système de l'intérieur, pourrait-on dire. Karaï développa donc un type de poème court à vocation nettement satyrique voire carrément subversive.
C'était le chansonnier de l'époque. Et tout comme les contemporains des Tokugawa en France (Louis XV, Louis XVI) n'appréciaient pas les pamphlets et épigrammes écrits sur leur compte, les senryû se virent bien vite visés par la censure des Shoguns. Qu'importe! les féroces petits poèmes continuaient à circuler sous le manteau, n'épargnant comme on l'a vu hier personne: clergé, personnages haut placés etc.
Formellement, le senryû est plus libre que le haïku: pas de kigo (mot de saison), idéalement dix-sept syllabes, mais réparties comme on le veut sur un, deux, trois ou quatre vers et non sur le 5-7-5 du haïku.
Surtout, le senryû est pétri de dérision: vis à vis des autres, mais aussi de soi-même. Il tape sur tout ce qui bouge
avec une joie féroce, mais toujours avec humour. Dans son Petit manuel pour écrire des haïkus, Philippe Costa estime que le senryû aurait toutes les chances
de faire fortune en France, où vit un peuple notoirement râleur, iconoclaste et gaulois (on a vu hier à quel point le senryû peut être leste). Effectivement, mais nous sommes peut-être trop bavards
et raisonneurs pour nous en tenir à des poèmes courts!
Le senryû est pourtant d'une redoutable efficacité, du fait même de sa concision. Il va droit au but et appuie avec délice pile où ça fait mal. Personnellement, je l'emploie surtout pour me moquer de moi-même, n'ayant pas trop le goût du commentaire politique. Quoique ... il y a six mois, un événement m'a suffisamment énervé pour que je commette ceci:
Ah oui, j'ai oublié un point: le senryû ne se prive pas d'employer un langage familier, voire argotique!
Comme je le disais hier, le senryû se distingue du haïku par ses thèmes, son ton, et aussi sa forme. Tout comme on considère généralement Bashô comme le père du haïku, de même attribue-t-on à Karaï Masamichi Hachiemon (1718-1790) celle du senryû. Il faut croire que les surnoms du Japon féodal étaient assez bucoliques, puisque Bashô, surnom de Matsuo Munefusa, signifie bananier, tandis que Karaï se voyait surnommé Senryû, le saule de la rivière!
Senryû vécut donc moins de cent ans après Bashô. C'était un fonctionnaire et un maître de poésie à Edo. Son style était beaucoup plus familier et populaire que celui du créateur du haïku. Par ailleurs, le contexte politique n'était pas le même. L'administration des Tokugawa, dont Senryû faisait partie, était en pleine déliquescence. Corruption, incurie, affaiblissement du pouvoir et mécontentement généralisé, tout cela ne pouvait qu'inspirer un poète en verve et qui vivait les failles du système de l'intérieur, pourrait-on dire. Karaï développa donc un type de poème court à vocation nettement satyrique voire carrément subversive.
C'était le chansonnier de l'époque. Et tout comme les contemporains des Tokugawa en France (Louis XV, Louis XVI) n'appréciaient pas les pamphlets et épigrammes écrits sur leur compte, les senryû se virent bien vite visés par la censure des Shoguns. Qu'importe! les féroces petits poèmes continuaient à circuler sous le manteau, n'épargnant comme on l'a vu hier personne: clergé, personnages haut placés etc.
Formellement, le senryû est plus libre que le haïku: pas de kigo (mot de saison), idéalement dix-sept syllabes, mais réparties comme on le veut sur un, deux, trois ou quatre vers et non sur le 5-7-5 du haïku.

Le senryû est pourtant d'une redoutable efficacité, du fait même de sa concision. Il va droit au but et appuie avec délice pile où ça fait mal. Personnellement, je l'emploie surtout pour me moquer de moi-même, n'ayant pas trop le goût du commentaire politique. Quoique ... il y a six mois, un événement m'a suffisamment énervé pour que je commette ceci:
Paris 2012
not'fric en fumée, et même
pas d'flamme olympique!
not'fric en fumée, et même
pas d'flamme olympique!
Paris 2012
le sable des chantiers gardé ...
pour Paris Plage!
le sable des chantiers gardé ...
pour Paris Plage!